Carl-A. Keller


Que Dieu ouvre votre cœur à sa lumière
pour que vous sachiez quelle espérance
vous donne son appel (Eph. 1:18)


 
Professeur Carl-A. Keller, Le Mont sur Lausanne
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  Religion - Spiritualité - Mystique

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La vérité des religions

Conférence pour la paroisse réformée, Lutry, 24 novembre 1999

Introduction

En principe, il y a quatre réponses possibles à la question posée : La vérité des religions.

a) Toutes les religions sont fausses, des projections de l'esprit, des illusions (Freud, Marx, les scientifiques scientistes).

b) Toutes les religions sont fausses, exceptés la mienne, christianisme ou islam (= peut-être la réponse la plus courante).

c) Ma religion est vraie, c'est la seule qui contient toute la Vérité, mais dans les autres religions il y a des grains de vérité (= attitude traditionnelle, depuis l'antiquité, des théologiens ouverts à la problématique des religions ; réponse officielle de l'Eglise romaine depuis Vatican II).

d) Toutes les religions sont vraies, car toutes les religions conduisent au même but ; comme il y a plusieurs voies qui permettent d'arriver au sommet d'une montagne (réponse moderne suggérée par une certaine lecture d'une tradition hindouiste, reprise par des théologiens "de pointe". Réponse volontiers offerte par des personnes sans engagement religieux).

Peut-être y a-t-il, de nos jours, encore une cinquième réponse. Elle dirait : toutes les religions sont bonnes, vraies et intéressantes, excepté le christianisme qui, lui, est absurde et culpabilisant, donc faux. Hélas ! (Réponse qui est le fruit de ressentiments et d'ignorance, donc à écarter).

Notre propos : proposer quelques réflexions élémentaires susceptibles – peut-être ! – de faire aboutir à une réponse qui n'est pas seulement celle d'un sentiment mais qui s'inscrit dans une perception systématique de la problématique.

A. Qu'est-ce qu'une religion ?

Nous ne nous demandons pas : qu'est-ce que la religion, c'est-à-dire la religion comme phénomène abstrait ou général. Car la religion ne se présente jamais sous une telle forme. Elle est toujours un fait concret et particulier : la religion d'une personne ou d'un groupe de personnes, d'une communauté religieuse. Elle peut même devenir la pratique d'un peuple et se présenter comme une civilisation. C'est le cas, évidemment, des "grandes religions", christianisme, islam, hindouisme, bouddhisme etc. Nous nous demandons par conséquent : qu'est-ce qu'une religion ? Une religion comme le christianisme ou l'islam ?

En réfléchissant à cette question, nous constatons immédiatement qu'une religion – le christianisme, l'islam, le bouddhisme etc. – est comparable à un édifice à trois étages ou trois niveaux. Cette observation est absolument fondamentale.

Comment définir ces trois niveaux ?

a) Il y a tout d'abord le niveau de la pratique concrète, niveau le plus évident, le niveau visible et palpable : des rites (culte individuel et/ou communautaire,baptême, eucharistie, des prières, lectures publiques etc.) ; une organisation communautaire (Eglise, hiérarchie, bref : l'institution religieuse) ; des exigences d'ordre moral ou éthique (une"Loi"), donc un comportement individuel et/ou social, un style de vie impliquant en général des incidences sur la vie politique, juridique, voire économique de la société dans son ensemble, c'est-à-dire de l'Etat (phénomène particulièrement évident dans le cas de l'islam, mais aussi du christianisme).

Ajoutons dès maintenant (nous y reviendrons) que cette insertion de la religion dans la vie concrète des gens et des sociétés expose la pratique religieuse au danger mortel de l'instrumentalisation et de la manipulation dans l'intérêt du pouvoir, individuel, étatique ou ecclésiastique – pervertissement fréquent mais fatal de la religion.

Voilà la religion au niveau du monde sensible, la religion telle qu'elle se présente à l'observateur qui se fie uniquement à ses sens physiques (rappelons dans ce contexte que certains ethnologues qui se proposaient uniquement de décrire la société qu'ils étudiaient niaient l'existence d'un phénomène distinct appelé "religion" ; pour eux, tout n'étaient que comportement individuel et communautaire).

b) Tous ces phénomènes visibles renvoient à un autre étage, à un domaine invisible, à un monde spirituel qui est radicalement inaccessible aux sens physiques, accessible uniquement à l'intelligence. Parce qu'il est accessible uniquement à l'intelligence, on l'appelle aussi "intelligible".

C'est dire que les rites que nous avons mentionnés sont censés nous mettre en contact avec des entités intelligibles ou spirituels, tels le Christ vivant, Dieu, le Saint Esprit, parfois aussi des anges ou des humains décédés mais ressentis comme vivants : les saints, la Vierge etc. Le pratiquant à la certitude que ces êtres spirituels cherchent de leur côté à entrer en contact avec les humains : que le Saint Esprit agit dans les coeurs et dirige les humains, que Dieu et le Christ vivant aiment le fidèle, ou encore que Dieu, le Créateur et Sauveur des créatures leur accordera le don de la vie éternelle,vie éternelle qui sera bien entendu un forme d'existence spirituelle.

C'est dire qu'à côté de la vie religieuse extérieure, au niveau du sensible, il y a la vie religieuse intérieure, au niveau de l'intelligible. C'est le cas de tous les systèmes religieux, islam, bouddhisme, hindouisme etc.

c) Mais toutes ces religions savent qu'au dessus du domaine de l'intelligible, ou à l'intérieur de la religion intérieure ou spirituel, il y a un dernier niveau, un niveau ultime, qui est le Divin inconnaissable ou l'Ultime tout court. L'Ultime tout court, inconnaissable, indéfinissable, indicible, sans forme et sans visage, est la Source de toutes choses, le Fondement de l'univers et de la vie. Il est Vie, l'Energie vitale mais transcendante qui fait apparaître et qui anime et le monde spirituel et le monde visible. Et toutes les religions précisent que cet Ultime sans formes et sans visages se donne des formes et des visages spirituels, qu'à travers ces formes et visages spirituels l'Ultime inconnaissable se donne à connaître et que l'Ultime dépourvu de parole se fait Parole.

Le niveau du spirituel est donc le lieu d'une convergence entre le désir de l'Inconnaissable de se faire connaître, et du désir des humains d'entrer en communication avec l'Ultime. C'est en pénétrant dans le monde spirituel que l'être humain religieux fait la connaissance de l'Ultime inconnaissable, qu'il s'associe à l'Ultime inconnaissable et qu'il s'unit à l'Ultime inconnaissable.

Le monde spirituel est le pont qui relie le monde physique et matériel à la Source ultime et inconnaissable de toutes choses, c'est le domaine intermédiaire où se rencontrent les pôles extrêmes de l'univers : le pôle du Fondement inconnaissable de toutes choses d'un côté, et le pôle du monde matériel et visible de l'autre.

En ce qui concerne le christianisme, nous avons déjà mentionné les entités spirituelles de ce pont ou domaine intermédiaire : ce sont essentiellement les visages de Père, de Fils et de Saint Esprit, c'est-à-dire la Trinité. La théologie chrétienne n'a jamais cessé de défendre ces deux aspects de l'Ultime chrétien : il est à la fois UN, Unité inconnaissable, et Trois Visages qui se donnent à connaître. Qui connaît les Visages de la Trinité, connaît ipso facto l'Inconnaissable.

La perception de ces trois niveaux – l'Inconnaissable, le domaine spirituel ou intermédiaire, et le monde sensible – nous aidera à progresser dans notre enquête sur la Vérité des religions.

B. La réalité du monde spirituel

Pour commencer, insistons sur le fait que toutes les religions affirment l'existence d'un monde intermédiaire, spirituel et invisible, qui s'insère entre l'Ultime inconnaissable et le monde phénoménal, visible. Ce monde intermédiaire, c'est d'abord les multiples visages du Divin – Allah avec ses Noms, les grandes divinités de l'hindouisme, le Bouddha (ou les bouddhas) spirituel(s) (les Bodhisattva) etc. Mais ce sont dans toutes les religions encore d'autres êtres ou entités spirituels (dans l'islam : le Calame, le Livre caché, les Livres, la Lumière de Muhammad, les anges etc.). Chaque religion connaît et vénère son propre monde spirituel, et pour chaque religion, le monde spirituel qu'elle connaît et qu'elle affectionne est l'image véridique de la réalité intermédiaire ; cette image est donc – "subjectivement" – vraie.

La question de la vérité des religions émerge ainsi comme la question de la vérité des mondes intermédiaires. Avant de traiter de la vérité des diverses images du monde intermédiaire il faut savoir si oui ou non un tel monde existe ou qu'il peut exister. Un monde spirituel, un domaine assurant la jonction entre l'Inconnaissable et le visible, un tel monde existe-t-il vraiment ?

J'aimerais proposer trois arguments en faveur d'une réponse positive à cette question.

a) L'existence d'un univers spirituel est implicitement admise par tout le monde, y compris les scientifiques les plus réfractaires à toute question religieuse. Ils admettent tous, implicitement, l'existence d'un monde spirituel. Car qu'est-ce qu'une science, ou qu'est-ce que l'ensemble des sciences, si ce n'est la construction d'un monde ou de plusieurs mondes intelligible(s), c'est-à-dire spirituel(s) ? Une science consiste à scruter une particule du monde visible afin de la rendre intelligible. C'est dire qu'on la transpose du matériel/sensible à l'intelligible, c'est-à-dire au spirituel. On transfère le matériel vers un système cohérent de concepts purement intellectuels. Ce système, fruit d'un effort intellectuel, c'est-à-dire spirituel, n'est nullement identique à la matière étudiée. Il en est une abstraction, un modèle, figurant dans l'esprit du chercheur, modèle spirituel qui, moyennant des manipulations intellectuelles, donc spirituelles, permettra de développer des techniques permettant, dans certains cas, d'agir sur la matière et de la transformer. Aucune personne de science ne contestera la validité, du moins relative, de ces mondes intellectuels/spirituels. Les mondes spirituels existent !

b) Tous les humains sont conscients du fait que le Fondement ultime de toutes choses est insaisissable et inconnaissable. On ne peut en dire ni qu'il est d'ordre matériel ni d'ordre spirituel. Il est au-delà des choses et des concepts. Les thèses cosmogoniques de nos astrophysiciens et cosmologues elles-mêmes (big bang et compagnie) n'offrent aucune réponse à des questions concernant l'"avant" de la première explosion ou de sa cause ultime. A ce sujet, les érudits font sagement régner le Silence – c'est le même Silence que celui dont les religions font état quand elles essaient, sans succès, de caractériser l'Ultime inconnaissable. Mais simultanément ces mêmes cosmologues sont bien obligés d'admettre implicitement – probablement sans s'en rendre compte – l'existence d'une sorte de loi ou de règle spirituelle, dont la nature peut être inférée à partir de ses conséquences, c'est-à-dire à partir du processus de déploiement de l'univers naissant tel qui est modélisé par les astrophysiciens. Il existe une loi inhérente au déploiement de l'univers, qui contrôle les processus. Cette loi, médiatrice spirituelle entre l'Inconnaissable et les phénomènes de l'univers visible, a présidé à l'évolution de ce dernier. Il existe donc un domaine intermédiaire entre l'Ultime inconnaissable et le monde des phénomènes visibles.

c) Un troisième argument m'est particulièrement cher bien qu'il ne soit probablement pas reçu par tout le monde. C'est que la pratique religieuse de l'humanité tout entière a consisté non seulement à affirmer péremptoirement l'existence d'un univers spirituel mais à effectivement communiquer avec lui. Il n'est pas possible d'étudier les témoignages de gens pratiquant les religions les plus diverses sans se convaincre de leur authenticité, de leur vérité. Ce sont en particulier ceux qu'on considère comme des mystiques, dans les grandes religions, mais aussi les chamanes des religions archaïques et tribales, qui évoquent leur rencontre avec le monde de l'Esprit, des divinités et des esprits avec une telle simplicité et limpidité, qu'on ne peut être qu'impressionné par ces accents de vérité (dans ma vie personnelle : la découverte de Māṇikkavācakar). On ne peut pas s'occuper de ces témoignages sans être envahi par la certitude que OUI, ces réalités spirituelles existent.

Je me demande souvent si l'homme moderne, celui qui depuis deux ou trois siècles a développé les sciences matérialistes, a raison de se croire plus intelligent et plus sage que toute l'humanité avant lui. Sommes-nous, les pionniers et les Prix Nobel des sciences matérialistes vraiment plus avancés que les sages de l'antiquité grecque ou chrétienne, que les maîtres des Upanishad et de la bhakti hindouiste, que le Bouddha et ceux qui l'ont suivi ? Je sais bien que de nos jours les sommités de la recherche scientifique récusent très souvent le scientisme plat de leurs prédécesseurs. Mais toujours est-il que l'esprit de ce scientisme plat est encore le pain quotidien de nos écoliers – le seul auquel ils ont droit –.

Malgré le fait (qui pourrait être un quatrième argument en faveur de l'existence d'un monde spirituel) qu'on entend de plus en plus fréquemment des voix qui se plaignent de l'absence, dans notre monde actuel, de spiritualité !

Conclusion : en ce qui concerne la perception de la vérité, le scientisme matérialiste qui domine encore notre société n'est pas plus avancé que les spirituels et les mystiques de tous les temps, loin de là ! Admettons donc que le monde spirituel existe. Et que, par conséquent, les religions sont vraies. Car la vérité des religions dépend de l'existence des univers spirituels.

C. Unité et diversité des religions

Il est indispensable de nuancer cette conclusion et de nous interroger sur les conséquences qui en découlent. Si toutes les religions sont vraies, sont-elles toutes équivalentes ou égales ?

a) Nous avons constaté que toutes les religions s'accordent sur un point essentiel : l'Ultime fondamental est au-delà de toute pensée, de tout discours, de toute connaissance possible. Il est évident qu'à ce niveau ultime et radicalement transcendant toutes les religions se rencontrent et sont identiques – parce qu'elles sont unies dans le Silence de l'Inconnaissable.

b) Passons maintenant au niveau opposé, à celui du sensible, du concret, des rites, de l'organisation sociale, bref, de l'institution religieuse, quelle soit chrétienne, islamique ou bouddhiste, par exemple. A ce niveau, la diversité irréductible des religions saute aux yeux. Les institutions religieuses de chaque grande tradition sont inconciliables avec toutes les autres. On ne peut pas être simultanément chrétien et musulman, ou bouddhiste. L'existence de toute personne religieuse s'inscrit dans un cadre religieux particulier. Une institution religieuse universelle qui engloberait toutes les institutions particulières est inconcevable. On pourrait imaginer, à la rigueur, que les institutions religieuses appartenant à la même grande tradition, chrétienne, par exemple, puissent fusionner. Mais les difficultés, voire l'échec des efforts qui vont dans ce sens, tel du mouvement oecuménique, ou de toute tentative de faire revenir les Eglises dissidentes à l'Eglise de Rome, montrent à satiété que toute institution religieuse fait preuve d'une grande inertie et qu'elle se rebiffe contre l'idée de se sacrifier en faveur d'un ensemble plus vaste.

Quelles sont les causes de cet état de fait ? J'en vois au moins deux.

D'un côté, c'est le besoin parfaitement légitime de rester fidèle à ce qui a été légué par les anciens. Personne n'aime à détruire ce que ses aînés ont construit. Notre époque elle-même qui chambarde tout et qui encense le principe révolutionnaire ressent le besoin de sauvegarder quelques institutions qui ont fait leurs preuves par le passé. L'institution religieuse en fait certainement partie.

D'autre part, il est inévitable d'inculper ici le grand ennemi, l'ennemi mortel de la vie religieuse : le pouvoir. L'institution religieuse se prévaut certes d'un acte créateur de Dieu, et ne saurait contester la présence d'une influence divine. Mais elle est aussi une institution humaine, trop souvent livrée au pouvoir de ceux qui la dirigent. Et le pouvoir fait des ravages, par exemple en imposant sa propre perception de la bonne tradition à l'ensemble de la communauté religieuse, c'est-à-dire en créant une "orthodoxie" qu'il entend maintenir à tout prix. Ce n'est d'ailleurs pas seulement le pouvoir religieux qui manipule ainsi son institution ; c'est très souvent aussi le pouvoir politique qui s'en mêle en instrumentalisant l'institution religieuse à ses propres fins.

L'institution religieuse accuse assurément quelques ambiguïtés. Elle est néanmoins indispensable. La vie religieuse ne s'épanouit qu'au sein d'une communauté, de ses rites, de son enseignement communautaire, des liens d'amitié et de soutien réciproque qui unissent ses membres. On ne saurait sous-estimer l'importance des rites, car ce sont eux qui encouragent les fidèles à passer au-delà du sensible.

Mais à ce niveau-là, au niveau du sensible, de la pratique extérieure et de l'institution religieuse, aucune religion n'est intégralement vraie. Sa vérité est toujours assombrie par des erreurs et des faiblesses humaines.

c) Reste le monde intermédiaire, le niveau du spirituel. Il est accessible à toute personne religieuse, et toute personne religieuse s'y meut dans une certaine mesure avec aisance. Toute personne religieuse a aussi la liberté de l'explorer plus à fond, de vivre plus pleinement les dimensions spirituelles de sa pratique et de s'élever jusqu'à l'intimité des êtres divins que connaît sa tradition. Le chrétien, par exemple, a tout loisir à devenir de plein droit enfant de Dieu, frère ou soeur véritable du Christ, premier-né parmi beaucoup d'enfants de Dieu, à fréquenter la Trinité et à devenir divin par participation.

Le domaine du spirituel et de la spiritualité est illimité. Il ne se confine pas dans le cadre bien circonscrit d'une tradition particulière. La personne de spiritualité qui s'y meut librement peut s'ouvrir à d'autres formes de spiritualité, islamique, hindouiste ou bouddhiste etc. Approfondissant de pus en plus la spiritualité de sa propre tradition, il rencontre ses autres traditions, fraternise avec elles, commence à les aimer. En son esprit, les traditions de spiritualité se fécondent mutuellement, et s'il rencontre des êtres de spiritualité d'autres traditions, il cherche l'échange avec eux. L'exploration du domaine du spirituel est un travail sans terme qui s'accompagne toujours d'une joie divine.

Alors, à mesure que cette exploration avance et que les découvertes et les expériences libératrices s'accumulent, la personne de spiritualité remarque un phénomène signifiant. C'est que sa propre tradition, l'institution religieuse dans laquelle elle a été élevée et qui l'a nourrie depuis le moment où elle s'est éveillée au miracle de la religion, et bien entendu aussi la spiritualité qui la fonde, lui deviennent de plus en plus chères. Une personne de spiritualité ne ressent aucun besoin de mépriser sa tradition, voire son institution religieuse, ni de changer de religion. Tout changement de religion est la conséquence d'une méconnaissance et d'une familiarité insuffisante avec la spiritualité.

Pour une personne de spiritualité, sa propre religion reste vraie, belle et passionnante, en dépit de ses faiblesses et de sa nature humaine, parfois trop humaine.

 

 

©2006-2008 Carl-A. Keller

 

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