Calvin mystique
Titre |
Calvin mystique : au coeur de la pensée du réformateur |
Lieu / Dates |
Genève : Labor et Fides, 2001 |
Collation |
194 p. ; 21 cm |
Collection |
Petite bibliothèque de spiritualité |
ISBN |
2-8309-1002-8 |
Jean Calvin (1509-1564) était-il un « mystique » ?
A-t-il pratiqué et enseigné une piété de type
« mystique » comparable à celle d'un saint François
d'Assise ou d'un Jean Tauler ? Le style de ses écrits et de ses prédications
rappelle-t-il la grande tradition de la mystique chrétienne,
notamment de la mystique catholique médiévale ? Peut-on le
compter parmi les représentants attitrés de la mystique chrétienne,
à côté des saint Grégoire de Nysse, saint
Augustin, saint Bernard, saint Bonaventure, sainte Thérèse
d'Avila et saint Jean de la Croix ? De prime abord, de telles questions
paraissent saugrenues. Calvin n'était-il pas le propagandiste d'une
foi et d'une théologie basées sur une interprétation
« fidéiste », voire littéraliste de la Bible ? un polémiste
redoutable, à la dialectique aiguisée par l'étude du
droit ? un législateur et moraliste intraitable qui a dirigé
« sa » ville de Genève avec une poigne de fer ? Calvin,
n'était-il pas le défenseur intolérant si ce n'est
fanatique d'un ensemble de dogmes, un militant qui n'a pas hésité
à condamner au bûcher des gens qui ne pensaient pas comme lui ?
Ne se situe-t-il pas aux antipodes de la mystique qui, on le sait – ou
on croit le savoir –, est caractérisée par une large
ouverture d'esprit et qui admet qu'il existe de nombreuses voies
permettant d'atteindre l'Ultime, le Divin, comme il existe de nombreux
chemins conduisant au sommet d'une montagne ? Bref, l'idée de
considérer Calvin comme un mystique ne relève-t-elle pas
soit d'une ignorance crasse soit d'un charlatanisme aussi naïf
qu'inconscient ?
Il est plus que probable que ce soit là la réaction de
nombreux lecteurs qui découvrent le mot mystique accolé au
nom de Jean Calvin. La thèse défendue dans cet ouvrage va en
effet à contre-courant des opinions répandues dans le
public. Cette thèse consiste à dire que l'image qu'on se
fait en général du grand Réformateur est pour le
moins terriblement biaisée. Nous espérons montrer que la
source de son énergie, le fondement de sa pensée et de ses
activités, le cœur de sa relation à Dieu se situent
dans une quête et une expérience qui nous suggèrent
irrésistiblement le qualificatif « mystique ».
Mais qu'est-ce que la mystique ? Vu la multitude de définitions
et d'interprétations défendues par les spécialistes
de l'histoire des religions, nous sommes obligés de dire quel sens
nous donnons à ce terme. La mystique peut se comprendre, et elle
est souvent comprise, comme l'une des formes du religieux universel qui se
retrouve dans toutes les traditions religieuses. Toutefois, dans ce livre,
nous nous concentrons sur un phénomène chrétien : la
piété de Jean Calvin, penseur chrétien, tributaire de
la tradition chrétienne. Nous pensons donc qu'il sera judicieux de
nous en tenir au donné chrétien et d'examiner l'emploi du
mot « mystique » au sein du christianisme. On constate immédiatement
que les substantifs « la mystique » et « le mysticisme »
sont des créations du XIXe siècle, alors que l'adjectif
« mystique » qui signifie à l'origine simplement « caché,
secret » est d'un usage très ancien, attesté dans le
paganisme grec aussi bien qu'au sein du christianisme.
Dans le domaine de la piété et de la spiritualité
chrétiennes qui nous intéresse, l'adjectif « mystique »
apparaît (après beaucoup d'occurrences antécédentes,
dans divers contextes) notamment dans un opuscule de la fin du Ve siècle,
d'un auteur anonyme connu sous le pseudonyme de Denys l'Aréopagite.
Nous avons nommé sa Theologia mystica dont nous proposons
une brève analyse en annexe à notre travail. Nous invitons
le lecteur à consulter cette annexe s'il cherche des informations
plus amples sur nos options. Ce petit livre a façonné et fécondé
de larges pans de la tradition chrétienne, notamment de sa
spiritualité et de sa « mystique ». Il contient deux
types de réflexions : d'abord une « théologie mystique »,
comme l'indique son titre, et ensuite l'itinéraire d'un cheminement
qui conduit l'adepte à la vraie plénitude de la théologie
« mystique », c'est-à-dire à la réalisation
de la vie « mystique » dans l'existence du chrétien.